La campagne

Samedi, je suis allée voir une pièce étrange... "La campagne"... Rassurez-vous, rien de politique dans cette pièce, pas question de campagne électorale :-) Non, il s'agit bien de cette bonne campagne anglaise, par opposition à la ville de Londres... La campagne, lieu supposé de calme, loin du tumulte et des tentations de la ville, du bruit et de la fureur (hé oui c'est une pièce anglaise, alors...)

Donc, "La Campagne". De Martin Crimp, un auteur anglais contemporain. Au théâtre du Rideau de Bruxelles. Mise en scène de Marcel Delval, avec Pierre Dherte, Marie-Paule Kumps et Valérie Marchant.
Jusqu'au 6 avril... Pour les dates, voir sur http://www.rideaudebruxelles.be/

Je serais tentée de dire, pour amateurs de théâtre contemporain surtout. Ne croyez pas que j'insinue que c'est une pièce intello! Mais bon, c'est mis dans le programme et c'est vrai, "il y a du théâtre plus simple que celui de Crimp"... En tout cas c'est une pièce qui demande une certaine attention, pas le genre de pièce à aller voir après une journée fatigante dans le but de rire et se détendre... Autant le savoir, ce serait dommage...

Sinon, c'est une pièce plutôt intéressante... A rapprocher, pour moi, de "Qui a peur de Virginia Woolf" d'E. Albee. Enfin en tout cas par certains côté "La campagne" m'y a fait penser. Mais en plus nébuleux... En tout cas, et sans rien dévoiler de l'intrigue, j'avoue qu'à un moment je me suis demandée si le couple au centre de la pièce avait vraiment des enfants...

L'intrigue : un couple de Londoniens, apparemment sans histoires. Il est médecin, elle ne travaille pas. Lui a des problèmes... de drogue... c'est apparemment pour ça qu'ils ont quitté Londres, pour s'exiler à la campagne. Se retrouver... à moins que ce ne soit pour se perdre? Il exerce donc comme médecin de campagne, avec un associé. Un événement étrange vient de se produire. Le mari a trouvé une jeune femme dans le fossé. Il l'a ramenée à la maison, elle dort. Mais qui est-elle? Est-ce vraiment une inconnue? Son malaise, à quoi est-il dû? Un manque?

La pièce oscille entre moments franchement drôles, peinture acide du quotidien et suspense anglais. On se pose pas mal de questions, on est déboussolé, on rit... Qui ment? Tout le monde sans doute... Mais qui ment quand? Qui est accro à la drogue? Qui fait du chantage, qui trompe qui? Et qu'est devenue...? En tout cas au final c'est assez touffu, on continue à se poser pas mal de questions en rentrant chez soi, et la pièce n'apporte pas toutes les réponses... Chacun peut interpréter les choses à sa manière, on peut imaginer différents scenarii de fin, d'ailleurs j'en profite, si vous avez vu la pièce et que vous lisez ce message, n'hésitez pas à laisser un commentaire ou m'envoyer un mail (via 'contacter l'auteur', dans la marge), je serais curieuse d'avoir d'autres interprétations.

Les acteurs sont excellents. Ils jouent sur différents registres, expriment des sentiments ambigüs. Un jeu tout en finesse pour Pierre Dherte, fort et faible à la fois, Marie-Paule Kumps étonnante dans ce rôle de l'épouse 'égarée', à la fois drôle, touchante, mystérieuse, inquiétante, et Valérie Marchant, fougueuse, tremblante, entre manque et lucidité, dangereuse?

Le décor est simple, quotidien... avec de jolis jeux de lumières, soleil (ou pas) passant par les fenêtres au travers du lierre,et rythmant les journées... Un mur de fond oblique pour perdre ses repères...
La mise en scène, magnifique, soutient parfaitement l'intrigue. Le rythme, et les ruptures de rythme, la manière dont chacun reprend en écho les paroles de l'autre, répond avec du retard, les silences soutenus, la musique, tout cela accentue une tension latente, qui risque d'exploser à tout moment, dans la violence, la folie?

(Ciseaux... ) (Pierre...) (Papier...)

Mary